| Aujourd’hui, les 
            médecins ne savent pas soigner toutes les maladies, notamment(especialmente) celles 
            qui résultent du vieillissement(envejecimiento) – on 
            parle de dégénérescence(degeneración) – des cellules, 
            telles que les neurones, ni les maladies graves, telles les 
            insuffisances cardiaques ou hépatiques. Le seul traitement est alors 
            la greffe, mais on ne dispose pas toujours de donneur(donante) 
            compatible avec la personne malade. Or(ahora bien) les cellules embryonnaires ou 
            les cellules souches(matriz, tronco) de l’organisme, 
            celles qui ont la possibilité de se «transformer» en n’importe quel 
            type de cellules, ouvrent un champ de recherche encore peu exploré, 
            mais prometteur. On ne sait pas encore cloner des 
            organes, mais si de tels organes étaient disponibles, ils 
            remplaceraient sans la moindre hésitation(duda) les greffons prélevés(extraídos) sur 
            une personne morte ou vivante. Un organe de substitution identique à 
            celui du receveur permettrait d’éviter toutes les difficultés posées(planteados) 
            par la diversité des êtres vivants, responsable des réactions de 
            rejet ; la «fabrication» de tels organes fait certainement partie 
            des objectifs médicaux. Le clone représente la copie 
            physique de soi : il est donc source de connaissance ou d’organes de 
            réparation de l’organisme. 
            Comment obtient-on un 
            clone? Il est extrêmement 
            aisé(fácil), en laboratoire, de croiser deux animaux de 
            la même portée et de sexe différent. En répétant ce croisement (frère 
            – sœur), sur plus de trente générations, on obtient une «lignée pure», 
            c’est-à-dire un ensemble(conjunto) d’animaux génétiquement semblables, et les 
            greffes, au sein de cette lignée, sont bien tolérées. En dehors de 
            folies eugéniques et de la propagande pour une race pure, l’idée de 
            proposer chez l’homme de tels croisements consanguins successifs est 
            à la fois prohibée et condamnée. 
            Une deuxième méthode 
            de clonage est employée chez l’animal : après fécondation in vitro, 
            on cultive l’embryon et on sépare ses cellules avant le stade de 16 
            cellules. Chacune des cellules ainsi récupérées (jusqu’à huit 
            cellules) peut être réimplantée séparément chez une femelle, donnant 
            naissance à un organisme entier. Ce cas de figure peut intéresser 
            le médecin. Prenons le cas où une maladie familiale est connue. On 
            pourrait alors pratiquer une fécondation in vitro et récupérer, 
            après culture, quelques cellules de l’embryon pour les étudier. Le 
            diagnostic, effectué sur une seule cellule grâce aux outils de la 
            biologie moléculaire, indiquerait la présence ou non de la maladie 
            redoutée. Ne seraient réimplantés que les embryons indemnes. Cette 
            voie de «sélection» embryonnaire était interdite en France, hormis(excepto, 
            salvo) quelques cas particuliers : elle implique la culture et 
            la manipulation de l’embryon, pratiques très encadrées. 
            Cependant, cette 
            méthode est autorisée, depuis peu, aux États-Unis et a été récemment 
            utilisée à l’Hôpital Necker.  Une troisième méthode, celle qui 
            a été employée pour créer Dolly, consiste à remplacer le noyau(núcleo, 
            hueso) d’un ovocyte par celui d’une cellule provenant d’un 
            autre animal de la même espèce. En effet, c’est dans le noyau qu’est 
            contenue toute l’information génétique ; l’embryon ainsi formé est 
            le sosie(doble) de l’individu dont est issu le noyau. Cette technique ouvre la voie à 
            la reproduction, sous la forme d’une copie conforme, de l’être qui a 
            donné le noyau. Ce clonage reproductif chez l’homme est rejeté par 
            les conseils éthiques. En revanche, si les cellules de ce même 
            embryon, formé à partir du noyau donneur, étaient cultivées in 
            vitro, elles auraient la capacité de donner différents types de 
            tissus (muscles, nerfs, peau, en fait, n’importe quel tissu). On 
            produirait un embryon, mais il ne serait pas implanté chez une femme 
            et ne donnerait que des cellules, identiques à celles du donneur de 
            noyau. Ces cellules seraient strictement identiques, mais elles 
            seraient «neuves» et pourraient remplacer les cellules 
            vieillissantes et dégénérées d’un organisme sans risque de rejet, 
            car elles auraient le même patrimoine génétique que le donneur du 
            noyau. De telles cellules dérivées d’un clone, produisant des tissus 
            de remplacement, seraient de précieux outils thérapeutiques. Ces deux aspects du clonage, 
            celui du diagnostic prénatal en cas de fécondation in vitro, et 
            celui du traitement des maladies dégénératives par des cellules ou 
            des tissus de remplacement, font que le médecin prête l’oreille 
            lorsque les discussions portent sur le clonage humain. Dans tous les 
            cas, il rejette catégoriquement l’idée de clonage reproductif, 
            c’est-à-dire du clonage qui donnerait naissance à un sosie(doble). 
               
 Laurent Degos 
            dirige le Service d’hématologie de l’Hôpital Saint-Louis, à Paris. Ce texte est extrait du chapitre 
            signé par l’auteur dans Les progrès de la peur, la Peur du progrès, 
            sous la direction de Nayla Farouki, à paraître en février 2001, 
            Éditions Le Pommier. |